jeudi 3 janvier 2008

Cible émouvante - Pierre Salvadori, 1993

« My name is Victor Meynard. I am fifty-five, and I work as a professional killer ». C’est par ces mots que se présente cet homme distingué et impassible (portant beau le quant-à-soi et la moustache poivre-et-sel irrésistibles de Jean Rochefort) que nous venons de voir défenestrer un homme tout en révisant, avec la même application, ses verbes irréguliers anglais (« To fly, I flew, flown ! »). Ce tueur à gages à la réputation aussi impeccable que les costumes ne le sait pas encore, mais l’imprévu est sur le point de chambouler sa vie, sous la forme de deux rencontres.

Le sort jette d’abord
entre ses pattes Antoine (Guillaume Depardieu), témoin tétanisé d’une exécution opérée par Meynard. Le jeune coursier à la candeur désarmante aura vite fait de se couler dans le rôle du tueur stagiaire que lui propose son aîné (en dépit de ou grâce à une maladresse sidérante), tout en donnant au passage quelques leçons de « lâcher-prise » au vieux garçon follement stoïque.

Victor entre ensuite en collision avec la mytho-klepto-nympho-mane Renée Dandrieux (Marie Trintignant, qui exploite à ravir son allure de coucou femelle), qu’un concours de circonstances échevelé va l’amener à sauver alors qu’elle lui a été désignée comme étant sa prochaine victime !


S’ensuit une course-poursuite frénétique, mi-screwball comedy mi-cartoon, à base de parrain Corse, d’hommes de mains farouchement médiocres (un surtout, Serge Riaboukine, hilarant), de massage nocturne des pieds, de tueuse douairière (Madame Meynard mère alias Patachou, qui se montre digne des pires sorcières de chez Disney), de bonsaï taillé ultra-court, de second-meilleur-tueur-du-marché vexé par tout semblant de comparaison et de chat bombé en rose fluo. Le tout au milieu de dialogues ballistiquement ajustés, ce qui est d’autant plus jouissif, et pour le spectateur (écroulé de rire de bout en bout), et pour les acteurs, qui semblent s’amuser comme des mômes en classe vert-de-gris dans cette comédie déjantée. (Im)moralité : l’excentricité est plus savoureuse assumée plutôt que réprimée, et le foutoir est salvateur.

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