jeudi 5 août 2010

Non ma fille tu n'iras pas danser (Christophe Honoré, 2009)

Et la chanson (Sur l'pont du Nord, pour ceux qui auraient oublié leurs classiques d'enfants) de continuer: Monte à sa chambre et se met à pleurer. Effectivement, pleurer, Léna (Chiara Mastroianni) le fait bien, et beaucoup. De l'avis de son entourage ou plutôt des femmes de son entourage (la mère, Marie-Christine Barrault, la sœur, Marina Foïs), c'est sans doute ce qu'elle fait de mieux, étant donné que tout le reste elle le fait mal. Elle a quitté son boulot et ne donne pas signe de vouloir ni le reprendre, ni en chercher un nouveau, elle a déménagé en cachette de son mari en emmenant leurs enfants puis divorcé dans la foulée, rien de tout ceci n'est très rassurant pour son équilibre à elle ou pour celui des petits.
Raison (?) pour laquelle sa mère et sa sœur combinent de sortir Léna de ce qu'elles voient comme une impasse bourbeuse et malsaine: la première attire l'ex-mari dans la maison de vacances où elle a invité Léna afin qu'il la décharge momentanément de son devoir maternel (vu comme trop fusionnel), la seconde arrange un entretien d'embauche. Fureur (légitime) de Léna lorsqu'elle comprend dans quel traquenard on l'a attirée, écœurement devant la bien-pensance de celles qui croient savoir mieux qu'elle ce dont elle est capable et ce qui est bon pour elle. 



Jusque-là je suis (forcément, n'est-ce pas) du côté de Léna, qui se trouve un peu dans la posture de Gena Rowlands dans Une femme sous influence: plutôt que de l'aider à gérer ses défaillances, ou tout simplement de lui laisser l'espace d'une respiration, d'un flottement réparateur dans sa vie, sa famille la dépossède de son libre-arbitre, attise ses doutes (déjà à la limite du pathologique) sur ses aptitudes, la pousse à poursuivre une course en avant qui, sans le temps de la réflexion, ne peut être que néfaste. Léna ne sait pas ce qu'elle veut mais ce n'est certainement pas en lui soufflant ce qu'elle devrait faire que cela peut s'arranger sur le long terme.

Et de fait cela ne s'arrange pas, et le film pour moi perd considérablement de son intérêt à partir de là puisqu'on voit Léna jouer à la roulette russe avec toutes les mauvaises idées qui peuvent se présenter, en faisant montre d'une inquiétante incohérence. Ah, si j'instaurais des relations amicales avec mon ex-mari? Finalement non, c'est un vrai connard, je le jette dehors sous les yeux de nos enfants. Ah mince, je suis retenue au boulot, si je l'appelais pour aller chercher les petits? Il le fait sans barguigner, mais je l'engueule copieusement. Tiens, et si je nouais une idylle avec ce copain de mon frère, naïvement amoureux de moi? Et puis zut, non, finalement je le plante nu sous les draps de la chambre d'hôtel et je vais sonner à l'improviste chez mon ex en lui suppliant de m'ouvrir. Et tout le long je pleure, je pleure, je pleure. 

C'est peut-être bête mais il ne m'a pas été possible de conserver de l'empathie pour Léna jusqu'au bout, et du coup le film a souffert de cette désaffection. L'enjeu dramatique était formidablement bien posé au départ (comment une femme peine à vivre à la hauteur des attentes que l'on formule pour elle, et se fait pousser sur la touche de sa propre existence), mais l'intermède de la légende bretonne, trop abscons (si quelqu'un peut m'expliquer le rapport avec le reste du film, je suis preneuse) et surtout le festival d'hystérie qui s'ensuit ne m'ont pas convaincue. Le retournement final du personnage de Marina Foïs, qui s'assouplit devant les insuffisances de sa sœur parce qu'elle a pris conscience des siennes, a achevé de m'agacer: c'est vachement simple de se rapprocher des autres, vu comme ça.

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